Méningite C : le vaccin trop peu utilisé

Publié le : 09 juin 20217 mins de lecture

Depuis 2009, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) recommande la vaccination anti-méningocoque  contre la méningite chez toute personne âgée de 1 à 24 ans. Malgré ces recommandations, la couverture vaccinale reste insuffisante pour assurer une immunité de groupe.

Plusieurs formes de méningites

Les méningites peuvent être d’origine virale (les plus fréquentes) ou bactérienne (les plus graves). Dans ce dernier cas, on distingue plusieurs germes, dont les méningocoques. Il en existe différentes souches, dont les méningocoques B, responsables des 2/3 des méningites mais relativement bénins, et les méningocoques C, minoritaires, mais qui provoquent des formes plus graves d’infections.

La méningite C se traduit par l’infection du liquide qui enveloppe le cerveau et la moelle épinière, appelées les méninges. Elle entraîne des séquelles auditives dans 20 % des cas. Encore plus sévère, le purpura fulminans est une forme parfois mortelle de septicémie, une infection généralisée du sang dans laquelle le méningocoque se dissémine dans l’ensemble de l’organisme. Parmi les 469 cas notifiés en France en 2015, il y a eu 11% de décès et 5% de séquelles précoces. La présence d’un purpura était un signe péjoratif (21% de décès).

En cas de symptômes suspects (nuque raide, fièvre élevée, vomissements, maux de tête…), il faut contacter les urgences au plus vite. Une fois l’infection identifiée, des mesures préventives sont prises afin de traiter les personnes qui peuvent être contaminées et éviter la diffusion de la bactérie dans l’entourage.

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Infections à méningocoques C : une incidence élevée en France

En moyenne, 175 cas d’infections invasives à méningocoques C ont été notifiés chaque année en France entre 2003 et 2008, mais avec d’importantes fluctuations cycliques : un pic est ainsi survenu en 1992, puis un second en 2002. La France figure en tête des pays européens dont le taux de nouveaux cas de méningites à méningocoque C est le plus élevé, particulièrement avant l’âge de 1 an (2,07 cas/100 000), entre 1 et 4 ans (1,2/100 000) et entre 15 et 19 ans (0,86/100 000).

En juin 2009, le Haut Conseil de la Santé Publique a recommandé la vaccination systématique contre le méningocoque C des nourrissons âgés d’au moins 1 an, des enfants, des adolescents et des adultes jusqu’à 24 ans. Cette recommandation a été approuvée par la Haute Autorité de Santé en octobre 2009 et figure au calendrier vaccinal depuis avril 2010. Elle vise à protéger les personnes n’ayant pas encore accès au vaccin comme les tout petits (moins de 1 an).

En pratique, une dose de vaccin est recommandée pour tous les nourrissons à l’âge de 12 mois (en même temps que la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole). De plus, en attendant qu’une couverture vaccinale suffisante permette la mise en place d’une immunité de groupe, un rattrapage jusqu’à l’âge de 24 ans révolus est aussi recommandé avec une dose de vaccin.

Mais d’après les résultats de l’enquête ERVM (Exploratoire Régional des connaissances des médecins généralistes sur la Vaccination Méningococcique)*, les taux de vaccination restent très en-deçà des objectifs.

Méningocoque C : une couverture vaccinale insuffisante

Cette enquête a été réalisée auprès de 632 médecins généralistes répartis sur 9 régions. Elle fait apparaître qu’en dépit des recommandations du HCSP, la couverture vaccinale reste faible dans certaines régions de France et certaines tranches d’âges, et ne permet pas une immunité de groupe. Si la majorité des médecins (85 %) déclarent connaître ces nouvelles recommandations, on peut s’interroger quant aux 15 % n’ayant pas répondu par l’affirmative. En outre, la plupart des médecins savent que l’intérêt d’une vaccination anti-méningococcique réside dans sa capacité à prévenir la contamination et les épidémies, et par là-même à protéger les enfants en particulier et la population en général. Mais certains pensent toutefois que son intérêt est faible (11 % des médecins généralistes du Bassin parisien Ouest notamment). L’enquête fait par ailleurs apparaître des disparités régionales importantes en termes de couverture vaccinale : la population, tous âges confondus, du Bassin parisien Ouest est ainsi la moins couverte, la proportion de jeunes vaccinés étant jusqu’à 3 fois plus faible que dans le Sud-ouest, où la campagne de sensibilisation a progressé plus rapidement.

Au 31 décembre 2014, la couverture vaccinale contre le méningocoque C était estimée à 64% chez les enfants de 2 ans, 53,6% chez les 3-9 ans, 28,7% chez les 10-14 ans, 20,5% chez les 15-19 ans, et 5,4% chez les 20-24 ans. Les 58 cas d’IIM C chez des jeunes de 1 à 24 ans non vaccinés, enregistrés en 2015 en France, témoignent de niveaux de couverture vaccinale encore insuffisants.

Des freins à la vaccination… qui devraient tomber

Pour le Pr Antoine Bourrillon, chef du service de pédiatrie à l’hôpital Robert Debré (Paris), « le grand objectif de santé publique est d’arriver à vacciner tous les enfants de manière à interrompre la circulation du germe ». Un objectif ambitieux, puisqu’il faudrait pour cela obtenir une couverture vaccinale de 95 % par tranche d’âge. Avec moins de 10 % chez les 18-24 ans, on est encore loin du compte…

Si l’on en croit les intentions de vaccination des médecins, la tendance devrait néanmoins s’améliorer, puisque la grande majorité des praticiens comptent multiplier de 2,5 à 5 fois la proportion de jeunes vaccinés selon la tranche d’âges durant les 10 mois à venir. Ils devront cependant surmonter deux difficultés majeures, à l’origine de la couverture vaccinale insuffisante : un calendrier vaccinal déjà trop chargé à leur goût (pour près d’un tiers des médecins interrogés), et surtout une réticence des parents à l’égard de la vaccination en général, que la campagne de vaccination H1N1 n’a certainement pas aidé à lever. Mais le Pr Bourrillon se veut optimiste. « Maintenant qu’il existe une recommandation officielle et que le vaccin est remboursé, il n’existe plus aucun frein ». La création officielle d’une Journée nationale contre la méningite chaque premier samedi d’octobre, à l’initiative de l’ Association Audrey, devrait déjà améliorer la sensibilisation du grand public à l’égard de cette maladie et, certainement, les amener à envisager la vaccination contre la méningite C pour leurs enfants.

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